mercredi 24 août 2016

Terminus BISHKEK ... je descends de velo

Après 3 jours de repos sur OSH, j'avais le choix de partir sur le centre du pays, vers le lac Song-Kol avec 9 jours de vélo, de la piste et des cols bien corsés pour rejoindre Bichkek. C'est la route privilégiée par les cyclo-randonneurs car plus jolie, plus pittoresque et avec des hébergements en yourtes autour du lac. Mais comme j'avais juste 10 jours devant moi et ne voulant pas me mettre de contrainte de temps et d'obligation de moyenne kilométriques par jour, j'ai préfère continuer mon chemin sur la route principale et goudronnée, la M41, en passant vers l'Est du pays et la vallée qui remonte sur le réservoir de Toktogul.

Le 1er jour, je roule avec Tom, un jeune belge sympa (fan du Grand Eddy Merckx)
On avait déjà fait une partie de route ensemble, entre le col AK-BAITAL et OSH.
A Jalal-Abbad, il part justement sur le lac Song-Kol et moi je reste une journée sur place pour profiter d'un sanatorium de l'ère soviet. Malheureusement toutes les activités sont fermées ou abandonnées et c'est une journée sans intérêt. Tant pis, je me serais quand même reposé avant de reprendre la route le lendemain.
La route est bonne, même si quelque peu ennuyeuse et les paysages un peu monotones.
Il faut attendre de longer la frontière avec l'Ouzbékistan, vers Shamaldy, pour trouver un peu de relief et les paysages bien plus sympas. Je continue à suivre la rivière avec quelques plans d'eau, servants aux barrages hydro-électriques de la région, et plusieurs arrêts-photos pour rythmer la journée.

Puis 2eme jour de repos a Toktogul. J'en profite, car justement le choix de cette route me donne 3 jours d'avance sur mon programme. Et je sais que les prochains jours vont être costauds.
En effet, juste après Toktogul, j'attaque mon avant-dernier col " le Ala-Bel Pass" : 3184m de haut dont 2650m de dénivelé positif, sur les 65km depuis Toktogul. "La pente est douce mais la route est longue" (ça pourrait être une "raffarinade", celle-là ... !!! on a les références que l'on peut ...). Et finalement ce col est plus difficile à passer, que je l'imaginais. D'abord, aucun moment de répit, il me faut pédaler sans discontinu sur les 65km, pas une descente ni même un faux-plat pour me relâcher. Puis ensuite j'essuie un orage de montagne sur les 20 derniers kilomètres : grêle, pluie glaçante et vent violent de face. Le col est moins haut que le suivant, mais il a la réputation d'être bien plus froid. Je le confirme !!!
Arrivé au sommet je pensais, d'après le Lonely Planet et ma carte, qu'il y avait un hôtel pour passer la nuit. Faux et raté !!!
Mais, je trouve à m'héberger chez des nomades kirghizes qui ont leurs campements d'été, avec leurs troupeaux de chevaux et vaches, au sommet du col. Et là, c'est le Top de l'immersion chez l'habitant.
Je prends d'abord le Thé pour essayer de me réchauffer et manger un peu, puis ensuite j'accompagne l'ainé des fils pour regrouper les chevaux et traire les juments. Le lait de jument est l'un de leur aliment de base. Ils en boivent comme du petit lait et en vendent aussi aux automobilistes de passage pour gagner quelques Somonis. 
Le 2ème fils essaie mon vélo, 2 fois trop grand pour lui, pendant que son petit frère lui cours après en criant et rigolant. C'est la fête pour eux, de s'amuser avec mon vélo....
Le soir, je partage le repas dans la roulotte avec toute la famille (perso, j'ai passé mon tour, pour boire le lait de jument...) et je dors dans la yourte qui visiblement sert d'hôtel "clandestin" aux voyageurs perdus ou aux camionneurs tombés en panne dans l'ascension du col ... c'est un super souvenir, un vrai moment de totale authenticité, qui restera un point fort de ce périple.

Le lendemain, c'est du bonheur. 57km de descente, ciel bleu, pâturages verts, chevaux galopants dans les plaines kirghizes, petits cours d'eau descendants des monts enneigés ... bref du régal, des paysages et des moments de toute beauté. 
Là aussi, j'en profite car le dernier col m'attend ...

C'est le TOR-ASHUU Pass. Début d'ascension à 2300m environ et le sommet est à 3586m, pour 12km de montée, avec des virages en épingle et de beaux pourcentage (12%) ..."La route est tordue et la pente est forte" !!! (2eme "Raffarinade". Cadeaux, c'est pour le même prix !!!).
Je passe le col assez bien (2h30 d'effort quand même) avec mon dernier tunnel en guise de cerise sur le gâteau. Je n’aime toujours pas les tunnels et celui-ci encore moins. Route défoncée, mal éclairé et tellement étroit que les camions ne sont pas autorisés à se croiser. Ils attendent à l'entrée du tunnel que le voyant vert les autorise à passer, quand les camions de l'autre cote sont au rouge.
C'est vraiment long, un tunnel de 2,5 km !!! Par contre, la descente de 3500m a 1000m d'altitude sur 45km est passée bien vite !!!
Pour ne pas reprendre le même orage, comme chaque après-midi depuis 3-4 jours, je pars tôt le matin. Bon choix, car je passe le col sous le soleil et les nuages sont déjà menaçants à midi quand j'attaque la descente sur l'autre versant du col.
Le lendemain, je trouve sur le bord de la route Peter, un allemand déjà rencontré au PAMIR (jamais vu un cyclo-randonneur aussi charge : 45kg de bagage + le vélo...) 
qui lui a pris l'orage et a dû utiliser un camion pour monter le col, passer le tunnel et redescendre. Il était rincé, au sens propre et figure.

Enfin, le dernier jour j'arrive sur Bichkek. Je pensais bien profiter de ces derniers kilomètres sur le plat, mais finalement la densité de circulation, les camions qui me frôlent et me serrent sur les bas-côtés de la route, la route bosselée ne me laisseront pas le temps de savourer mon arrivée sur Bichkek, le Terminus de ces 2319km depuis Douchanbé.
Voilà, j'ai fini mon parcours. J'étais venu pour voir les paysages que j'espérais beaux et surprenants... j'en suis pleinement heureux et comblé. Franchement, ce sont des endroits grandioses, sauvages et cette perception des grands espaces est fabuleuse.
Il y a aussi cette diversité de couleurs et de reliefs, entre les déserts arides du Pamir et les vallées verdoyantes du Kirghizstan,
Les photos ne remplaceront jamais le réel, mais j'espère qu'elles donneront une bonne idée de ces paysages et pourrait peut-être vous donner envie d'y (re)venir.

Je retiens aussi de ce voyage, la très grande gentillesse, l'accueil et la joie des personnes croisées sur les bords des routes ou ceux qui m'ont accueilli.
Vraiment, un accueil exceptionnel, humainement riche et je reste toujours aussi contrarié de ne pas sortir plus de 3 mots de russes/tadjiks/kirghiz. De mes différents voyages, j'ai rarement été aussi frustré de cette barrière de la langue car il y aurait tant à échanger et comprendre de la vie de ces nomades, des Kirghizes, des Pamiris, des Tadjiks et plus généralement de toutes ces communautés locales.

Je savais aussi que ce sera physique. Ça l'a été et bien costaud.
Finalement, sur ce parcours, on a toute la palette des difficultés du voyage à vélo :
- les pistes difficiles : sable, cailloux, poussière, un peu de boue ...,
- la grande altitude et le manque d'oxygène, jusqu'à 4655m, soit à 200m du Mont Blanc et la 2eme route la plus haute du monde.
- les ascensions de cols : 12 cols au total, dont 4 à +4000m, 4 à +3000m, ...
(PS : pour comparaison, l'Alpes d'Huez, c'est 700-1800m environ et 12km d'ascension !!!)
- les conditions météo : vent, pluie, froid sur les hauteurs ... chaleur +35-40°C en plaine.
- le poids des bagages pour être en autonomie sur plusieurs jours (eau, nourriture)
Un beau challenge !!! Et pour preuve des calories brulées sur la route, je reviens allégé de 9-10kg environ, pour 5 semaines de vélo ... et ... 3 semaines de Tourista !!!


Pour conclure et même si je suis encore sur Bichkek, sans avoir trop de recul sur ce voyage, je sais déjà que ça restera comme un beau et même un très beau voyage, avec beaucoup de bons souvenirs et d'émotion.
Tous les composants d'un beau voyage y sont réunis : beauté des paysages, contact chaleureux avec les locaux, dépaysement garanti, du sportif,  ... et en plus, c'est pas cher !!! (Nb : c'est une info pour mon Leonard ... il verra aussi que je suis affuté comme un lévrier afghan, avant Athenes Authentic 2016)


Santé :
Tout va bien !!! plus aucun souci gastrique au Kirghizstan. Aucun trouble musculaire ou articulaire, en pleine forme.
Je reviens avec mes 2 mollets entiers !!! ... Qui dit jolis pâturages verdoyants du Kirghizstan, dit aussi troupeaux de bêtes, mais surtout chiens de bergers qui surveillent et n'aiment pas du tout voir passer les cyclistes. Depuis OSH, j'ai eu plusieurs alertes de chiens qui m'ont couru après. Ils sont vifs ces bestiaux !!!

vie du blog :
Aller encore un peu de patience !!! je rentre dans quelques jours et je commencerai aussitôt le tri des centaines de photos. Donc, consultez le blog régulièrement, j'essaierai de les télécharger rapidement et par étapes : Le Tadjikistan, puis le Pamir, puis le Kirghizstan.
Je remettrai aussi un peu d'ordre dans les textes, avec un clavier Français et les accents qui vont avec.
J'y ajouterai aussi quelques images pour illustrer les textes, si besoin.

Bien plus tard dans l'année, j'attaquerai le montage vidéo car je pense revenir avec assez de matière pour une compilation. Pas de date, mais je tacherai de finir avant les vacances de Paques 2017, pour le proposer aux classes de CE1-CE2


















mercredi 10 août 2016

L'eloge de la lenteur ... et de la patience

On dit souvent que le voyage à vélo est l'éloge de la lenteur. C'est d'autant plus vrai pour passer la route du PAMIR.
L'état des pistes, le dénivelé, l'altitude, le manque d'oxygène, le froid, le vent, la tourista du voyageur, ... m'obligent à avancer lentement, avec patience et une moyenne de 8-10-12km/h, et ceci malgré 6-8h de vélo par jour. J'avance de 50 km/jour, mais la lenteur à cette vertu de me laisser contempler des paysages absolument GRANDIOSE, FABULEUX, EXTRAORDINAIRE !!! C'est avec le sud de la Bolivie et le désert de NAMIBIE mes plus beaux coins de désert, que j'ai eu la chance de visiter.
 De Khorog, j'ai pris l'option du Corridor de Wakhan. Je le longe avec, à ma gauche les sommets enneigés Tadjik de +7000m (Pic Engels, Pic Karl Marx), à ma droite la rivière servant de frontière avec l'Afghanistan et tout en arrière-plan les sommets enneigés de +6000m du Pakistan.
De LANGAR, je remonte sur la route principale M41 avec encore des paysages fabuleux, les lacs d'altitude et une piste qui serpente entre les collines. Ce passage est un de mes plus beaux coins.
Une fois sur la M41, je continue à me régaler entre Alichur et Murgab. Je me régale d'autant que la route est goudronnée et je peux enfin lever sereinement la tête de mon guidon et des deux mètres de piste qui se trouvent devant mes roues, pour contempler les belles couleurs de ces montagne arides.

A Murgab, je me lance vers le sommet de la PAMIR Highway, avec le passage du col Ak-Baital à 4655m. Nous sommes plusieurs cyclo-randonneurs à faire cette route. Nous sommes tous au PAMIR Hôtel de Murgab, et partons presque ensemble et chacun à son rythme de voyageur. Durant les prochains jours, nous allons nous retrouver le soir pour un bivouac ensemble, ou dans une yourte pour un Thé-Pain, ou dans la même GuestHouse. On s'informe des avancées des uns et des autres et on se retrouve tous (ou presque) à OSH dans la même auberge (TES GuestHouse) pour un débriefing géant autour d'une(s) bière(s), bien méritée(s). On a vraiment le sentiment d’appartenir à la même aventure, à la même communauté.

Ce passage de Murgab et Osh offre de meilleures conditions de pistes que le Corridor de Wakhan, mais l'altitude donne du mal, avec un coup de froid sur les bronches et la gorge, une montée de fièvre mais aucun signe du mal de montagne. La montée progressive et en douceur a été bénéfique et salvatrice.
Les paysages restent grandioses, surtout les couleurs du Lac de Karakul, d'un bleu vif sur fond de barrière de montagnes enneigées

Sur la route, je croise aussi d'autres cyclo-randonneurs qui viennent de OSH vers Murgab et entre autre une belle et heureuse surprise. Je rencontre dans le no-man's land de 20km, entre les 2 frontières Tadjiks/Kirghiz, le couple du projet "le vélo de la soie" ... ce sont les gagnants du Concours CYCLABLE et moi, leur dauphin !!! on s'était contacté avant nos départs, mais finalement de se croiser dans ce no-man's land est presque improbable !!! On est reste une bonne 1/2h à parler et on garde contact pour échanger sur nos voyages et projets respectifs, après nos retours en France.

Maintenant que je suis sur OSH, je peux faire le décompte de mes 10 sommets franchis.
Et ceux qui sont en manque de chiffres pour le prochain loto, je leur donne une source d'inspiration :
1er col. Nurek = 1584m
2eme col Shar Shar = 2185m
3eme col Shuraobad = 2267m
4eme col Kargush = 4344m
5eme col Naizatach = 4137m
6eme col AK Baital = 4655m
7eme col Kysyl Art = 4282m
8eme col "40 ans du Kirghistan" = 3568m
9eme col Taldyk = 3615m
10eme Chyrchysk = 2408m
... (il me reste encore 2 cols a 3000m au Kirghizstan)

Coté santé, vous avez compris que j'ai pris froid en hauteur, comme tous les cyclistes. On transpire en montée, on a froid en descente et même si on se couvre bien on se fait piéger en respirant l'air froid.
On prend aussi plus d'UV et de coup de chaud/soleil car la protection UV est moindre à 4000m ... bref, on a tous les bronches et la gorge prise, un coup de chaud/froid et pour se réhydrater ce n’est pas facile de boire de l'eau glaciale avec la gorge en feu !!
Mais, vous avez aussi note que le pire fut la Tourista ... un épisode tous les 2-3 nuits et un stop obligatoire de 1 jour à ALICHUR pour passer un épisode un peu plus pénible de 3nuits/2jours en continu.
Pour l'hygiène de base, le Tadjikistan est une catastrophe et rarement vu de telles erreurs basiques d'hygiène, comme placer les toilettes au-dessus des rivières, laver les boyaux des bêtes dans les cours d’eau où 300-500m en aval tout le village se sert en eau pour les usages quotidiens !!! sans parler de l'état de propreté de ces dites "toilettes", le peu d'usage de savon ... bref, tout le monde y passe avec plus ou moins de douleur et de durée !!!

L'hospitalité exceptionnelle et la gentillesse Kirghiz est toujours là et bien présente, même si j'ai pu constater quelques petits changements à l'approche des routes touristes, comme vers Khorog et Murgab.

En voyageant sur ces routes perdues (en été), j'ai vite compris la difficulté de vivre dans ces coins austères. J'imagine les conditions de vie en hiver, sur des routes impraticables, par -40°C avec des mètres de neige et du vent glacial, et d'avoir comme seul chauffage de la bouse de Yak séchées. Il n'y a pas de foret et d'arbre qui poussent sur ces montagnes pour offrir un combustible performant.

Bémol de ce voyage pour l'instant, c'est le blocage de la langue. Impossible pour moi d'échanger avec les locaux qui ne parlent pas l'anglais et moins pas un seul mot de russe. C'est véritablement frustrant, d'être invite au Thé et ne pas sortir un mot, sauf d'échanger par mimes et gestes ...

Question vélo, il se porte bien. 2 crevaisons au compteur. Presque une aubaine, tellement les routes étaient défoncées. Sur la 2eme crevaison, j'ai profité pour basculer l'enveloppe arrière à l'avant, car l'usure s'accélérait, due à la charge des bagages et les pistes abrasives.
Je viens à l'instant de constater une micro fissure, sans gravité, sur ma jante arrière. Je vais surveiller cela, mais normalement sans conséquence pour rejoindre Bichkek. C'est un peu le point faible de mon vélo, d'avoir des roues de 700mm pour passer les pistes cassantes, mais à l'inverse ça roule mieux sur le bitume. Pour le reste, il est en forme et surtout en comparant les dégâts sur les autres vélos des copains (fissures moyeux, casse porte-bagages, Pneu exploses, ...)

A suivre :
Je descends sur Bichkek, en 12 jours, pour y être le 23Aout avec un avion dans la nuit du 25-26 Aout.
Je calcule le meilleur itinéraire et le meilleur état de la route. Je garde 2-3 jours de relâche avant d'arrivée sur Bichkek.

Vie du Blog :
Décision irrévocable : aucune photo !!! J'ai aucune confiance aux cyber-cafés d'ici !!! et je me mordrai les doigts de prendre un virus sur mes cartes photos, surtout à 15j d'attente. Mais je sais que c'est frustrant de parler de décor GRANDIOSE et de ne pas montrer une seule photo ... d'autant que la plupart de vous, aller les découvrir à la fin de vos vacances et le retour au travail !!! petit supplice en perspective !!!